LE MONDE | 10.07.08 | 14h:46
L'alliance Renault-Nissan veut imposer rapidement sa voiture électrique. Après Israël et le Danemark, c'est au Portugal qu'elle a signé avec le gouvernement un accord pour favoriser l'utilisation des voitures électriques grâce à la création d'un réseau national de stations de rechargement des batteries.
Comme d'autres pays, le Portugal, qui ne produit aucune énergie fossile, cherche à réduire sa dépendance aux importations pétrolières. L'objectif du premier ministre, José Socrates, est clair : accroître l'autonomie énergétique de son pays. "
Nous traversons un choc pétrolier violent qui affecte tout le monde. Nous n'allons pas rester les bras croisés comme lors des deux chocs pétroliers", explique-t-il. Le Portugal est un petit pays, ce qui devrait favoriser la viabilité d'un tel projet.
Tout s'est fait très vite ; les premiers contacts entre le gouvernement portugais et Carlos Ghosn, président du constructeur automobile, ont eu lieu en mai lors d'une manifestation, organisée par Nissan, présentant une multitude de modèles du groupe.
Pour l'instant, le gouvernement portugais n'a pas fait voter d'incitations fiscales. Or, le soutien du gouvernement est indispensable pour convaincre les clients de se tourner vers ce type de motorisation. En Israël, une loi a abaissé la taxe sur les voitures électriques à 30 % jusqu'en 2019, alors que les autres véhicules subissent une taxe de 72%. Au Danemark, le gouvernement a aussi décidé de mettre en place des incitations fiscales.
Renault-Nissan devra adapter ses batteries aux besoins de chaque pays. En Israël, par exemple, 100 kilomètres d'autonomie sont largement suffisants. Le pays est tout petit et les Israéliens roulent en moyenne moins de 50 kilomètres par jour. En revanche, aux Etats-Unis, où la voiture électrique doit être lancée en 2010, elle ne commencera à être intéressante qu'à partir de 100 miles (160 kilomètres). Mais Renault-Nissan ne s'interdit pas d'imaginer des solutions hybrides électrique-essence) pour rassurer les clients: "
voiture électrique munie d'un moteur à essence qui prendrait le relais en cas de panne".
Pour réussir le pari de la voiture électrique, les constructeurs devront dessiner une voiture totalement nouvelle, et non se contenter de transformer un véhicule déjà existant. Renault s'est engagé à créer toute une gamme de modèles électriques. "
Ce sera une voiture très moderne, avec un design attractif et qui sera très rapide", indique-t-on chez Renault. De même, le groupe n'exclut pas de construire des usines de batteries.
Reste un problème: le prix. L'accès à cette technologie coûte deux à trois fois plus cher qu'un moteur à essence. Des solutions devront être imaginées pour alléger ces coûts et mettre à égalité de prix une voiture à essence et une voiture électrique sans batterie. L'idée la plus couramment avancée consiste à louer la batterie et à la changer dès qu'elle sera déchargée.
En se lançant dans la voiture électrique, Renault ne prétend pas régler le problème de la cherté du pétrole. Mais le constructeur estime que jamais la conjoncture n'a été aussi favorable à la voiture "zéro émission de CO
2". Selon M. Ghosn, le potentiel du marché à l'horizon 2015 s'élèverait à 10 millions de véhicules.
Néanmoins, rapportée au milliard de voitures qui devraient circuler dans le monde dès 2010, cette motorisation sera encore très marginale. Mais compte tenu des incertitudes sur la hausse du prix du baril de pétrole, la croissance pourrait connaître une accélération.
Dans ce contexte, Renault-Nissan espère multiplier les accords. En France, le groupe discute avec des entreprises et des villes. Le constructeur s'est aussi déjà mis sur les rangs pour signer avec Londres et proposer son offre pour les Jeux olympiques de 2012.